De la toile aux coordonnées : cartographie de l’art public à Saskatoon
ArcGIS StoryMaps aide les communautés à raconter et à présenter leurs histoires. La Ville de Saskatoon se sert d’ArcGIS StoryMaps pour présenter les œuvres d’art publiques qui ornementent tous ses lieux.
La science de l’information géographique (SIG) et la cartographie sont souvent présentées comme étant à la fois un art et une science. L’on peut certainement établir un lien entre la cartographie et l’art : les techniciens SIG doivent être capables de transmettre et de présenter des données spatiales de manière claire et visuelle; la symbologie d’une carte est une question de choix artistique; et le terme « cartographie » renferme le mot « art ». Une peinture commence par une toile vierge, suivie d’une ébauche, puis d’une esquisse et, enfin, de couches et de couches de couleurs qui aboutissent au tableau définitif. Eh bien, une carte se crée de la même manière : un projet vierge, une géodatabase, un fond de carte, puis des couches et des couches de données et la conception d’une symbologie en vue de présenter la carte finale.
Le monde des SIG et celui des arts convergent encore davantage, avec des personnalités influentes dans le domaine de la cartographie comme John Nelson, qui enseigne la création de cartes uniques avec une symbologie géniale et anime des webinaires sur la création de fonds de carte artistique en s’inspirant de l’œuvre de Paul Cézanne. En tant que spécialiste des SIG et artiste amateur (voir « M. Souris, l’accordéoniste » ci-dessous), je suis particulièrement attentive à ces chevauchements et intersections.
À gauche, une capture d’écran de l’incroyable tutoriel de John Nelson sur la création de cartes de type aquarelle et, au milieu, un fond de carte inspiré des coups de pinceau de l’artiste français Paul Cézanne, qui a peint des paysages et des natures mortes. Découvrez le processus de conception créative d’un fond de carte décrit dans ce récit. Et, à droite, l’une de mes propres aquarelles, représentant une petite souris jouant de l’accordéon.
Mais il existe une autre intersection entre l’art et la cartographie, au sein de l’aspect logiciel de la conception de cartes : l’utilisation des SIG et de la cartographie pour indiquer l’emplacement des œuvres d’art publiques. Les SIG et la cartographie rencontrent les œuvres d’art avec la carte narrative de l’art public créée par la Ville de Saskatoon.
Pour les amateurs d’art comme pour les simples citoyens, ce récit sur l’art publique aide les Saskatoniens à connaître l’emplacement des œuvres d’art et à en savoir plus sur les artistes qui les ont créées et les déclarations qui les accompagnent. Ce récit présente 85 œuvres d’art (et le nombre continue d’augmenter!) situées dans toute la ville de Saskatoon, avec une photo professionnelle haute résolution de chaque œuvre accompagnée d’une déclaration écrite par l’artiste, et un circuit cartographique indiquant l’emplacement de chaque œuvre d’art public. La carte interactive intégrée dans le récit permet aux amateurs d’art de naviguer dans Saskatoon, en faisant un panoramique sur la carte et en cliquant sur chaque point ou en faisant défiler l’encadré pour lire la déclaration d’artiste liée à chaque œuvre. Les points de localisation des œuvres d’art public sont placés sur le fond de carte de la carte communautaire du Canada.
La Ville de Saskatoon est contributrice de données pour la carte communautaire du Canada et, à ce titre, elle synchronise régulièrement (en temps réel) ses données ouvertes avec ce fond de carte, de sorte que la représentation de la ville soit continuellement fidèle. Elle participe activement au programme de carte communautaire depuis 2010, et le fond de carte topographique qui est issu de ce programme et qui a été utilisé aux fins de cette tournée cartographique a mené la Ville à créer ce merveilleux récit qui la dépeint.
Capture d’écran de la carte narrative sur l’art public dans la ville de Saskatoon, montrant les onglets permettant d’accéder aux œuvres d’art public de chaque quartier et le début de la tournée cartographique permettant de naviguer parmi toutes les œuvres d’art public présentées.
La ville de Saskatoon possède une communauté, une histoire et une présence artistiques riches et dynamiques. Il est clair qu’il ne manque pas de créateurs à Saskatoon. Les longs hivers de la région amènent ses habitants à se lancer en une quête introspective qui stimule leur créativité, leur sens de l’exploration et leur dévouement aux arts et à la culture. En effet, en rédigeant ce billet, j’ai eu la chance de rencontrer deux des développeurs du récit qui travaillent pour la Ville de Saskatoon, Nancy Bellegarde et Alejandro Romero. Il se trouve qu’ils sont également des artistes multimédias, et j’ai demandé à ce que leurs œuvres soient présentées ci-dessous.
« Kitty & Pinky » de Nancy Bellegarde (à gauche) et « Tree Destiny » d’Alejandro Romero (à droite). Nancy a créé son œuvre dans le cadre d’un cours de ferronnerie qui durait une semaine. Elle y représente ses deux petits chats rescapés qui l’attendent à la maison. Ces pièces se veulent une ode à ces deux magnifiques compagnons, maintenant disparus depuis longtemps. L’œuvre d’Alejandro a été réalisée avec des acryliques sur du papier Strathmore.
La présence saskatchewanaise est très forte au sein du CARFAC (Canadian Artists’ Representation/Le Front des artistes canadiens), qui est la voix nationale des artistes visuels professionnels du Canada. Nancy est elle-même membre du Conseil de l’artisanat de la Ville et du groupe de forgeronnes Sisters of Fire. On constate toute l’importance de l’art public à Saskatoon, que l’on parle d’œuvres très visibles comme une grande peinture murale volant la vedette dans un récit, ou encore de secrets mieux gardés (comme le dirait en plaisantant Alejandro, et je lui concède que la plupart des belles vues artistiques sont souvent cachées).
À vrai dire, ce n’est pas la première fois que l’équipe de Nancy et Alejandro crée un dépôt d’œuvres d’art publiques sous forme de récit pour les artistes de Saskatoon. Les données relatives à la collection d’art public ont d’abord été publiées dans un catalogue imprimé (vers 2009-2011), mais cela n’a jamais répondu au besoin d’une disponibilité dynamique des informations sur chaque pièce et sur les endroits où les amateurs d’art peuvent trouver l’art public. Ce récit a connu quelques rééditions (en raison de corruption de données ou d’utilisation de codes de couleur à la place des quartiers pour la tournée cartographique). Mais, en fin de compte, cette version définitive a été rendue accessible au public en octobre 2023.
Cette carte narrative d’œuvres d’art publiques présente plus de 85 pièces de leur vaste collection couvrant 100 ans d’histoire artistique (depuis 1921). Les œuvres d’art présentées appartiennent à des particuliers ou ont été prêtées et agrémentent une collection exhaustive qui comprend également des œuvres d’art autochtones. Selon les conservateurs du récit, le parcours de vérité et de réconciliation des autochtones se situe au cœur de la collection d’œuvres d’art et de son objectif.
Plus de 10 % de la collection d’art public de Saskatoon est constituée d’œuvres autochtones ou créées en collaboration avec des artistes autochtones, soit un total de 17 pièces ayant trait à la vérité et à la réconciliation, ce qui représente une proportion élevée pour les collections d’art municipales canadiennes de cette taille. Parmi les artistes autochtones figurent Ruth Cuthand, Joseph Naytowhow, Ken Williams et Lloyd Pinay. Désormais, grâce au récit, les utilisateurs peuvent trouver les œuvres de chaque artiste, y compris les cinq arrêts d’autobus conçus en collaboration avec des Aînés autochtones, des artistes et des spécialistes du transport en commun. Ce projet a été réalisé en collaboration avec Saskatoon Transit pour soutenir l’appel à l’action no 79 de la Commission de vérité et de réconciliation, qui porte sur l’élaboration de plans de réconciliation visant à commémorer le patrimoine autochtone. Étant donné que le récit comprend la description de l’œuvre, la déclaration qui l’accompagne et qui est formulée par l’artiste, ainsi que son emplacement géographique, les thèmes et messages importants de cette œuvre peuvent être partagés, comme ceux des quatre œuvres de Joseph Naytowhow créées en commémoration des femmes autochtones disparues et assassinées (FADA).
Dans le sens des aiguilles d’une montre, en partant du haut à gauche : Dream Walker par Leslie Potter; Nutana (abribus) par l’Aîné Harry Lafond et des étudiants de Nutana Collegiate; Inner City par Josh Jacobson; Saskatoon Cougar par Kevin Quinlan; et River Landing Tree Grates par les Aînés Stan Cuthand, Malvina Eagle, Simon Kytwayhat, Katie Poundmaker et Eliza Swimmer.
Le plus souvent, l’art est relégué à quelques endroits isolés : les musées. Mais en exploitant la puissance des SIG, des données spatiales communautaires et de la narration, les œuvres d’art public et leurs messages peuvent être amenés dans chaque quartier et partagés avec la communauté qui vit le plus près de chaque lieu (voire avec les visiteurs). Il s’agit d’une excellente façon interactive de partager l’art et les messages qui le sous-tendent, ainsi qu’une brillante manière d’utiliser les SIG pour parler de la convergence de l’art et de la science, de l’art public et de la cartographie… bref, de « l’art » dans la cartographie.
Parcourez ici la carte narrative portant sur l’art public à la ville de Saskatoon.
Ce billet a été écrit en anglais par Emma Melis et peut être consulté ici.