Bâtir les capacités des municipalités en matière de données géospatiales
Nous avons voulu examiner les facteurs humains et organisationnels qui influencent la façon dont prennent forme les collaborations en matière de données géospatiales.
Les municipalités canadiennes ne manquent certainement pas de défis à relever : transformation des services et infrastructures en place (comme les systèmes d’intervention d’urgence) pour offrir le niveau de service auquel les résidents s’attendent, planification d’une croissance durable, sans compter les combats pour contrer les effets des changements climatiques à l’échelle locale.
Cela dit, la capacité d’exploiter pleinement les données géospatiales pour relever tous ces défis varie grandement d’une municipalité à l’autre. Les plus grandes d’entre elles peuvent compter sur des équipes SIG et d’importantes ressources connexes, tandis que les petites municipalités disposent généralement de moyens limités en matière de SIG.
Comment combler de telles lacunes? Est-il possible d’accroître la collaboration entre les municipalités et de miser sur un partage d’expertise et de ressources pour bâtir des capacités géospatiales collectives permettant de résoudre des problèmes communs?
Voilà précisément la conversation que nous souhaitions entamer lorsque Nord Ouvert et Esri Canada ont lancé ce projet de recherche l’été dernier. Une analyse approfondie des pratiques actuelles au Canada et ailleurs et la tenue d’entrevues avec des représentants de neuf municipalités, associations et organisations de la société civile nous ont permis de brosser un tableau plus clair des collaborations entre administrations en matière de données géospatiales.
Q : Qu’est-ce qui a déclenché l’intérêt pour la collaboration?
Certaines des premières collaborations impliquant le partage de données reposaient sur la technologie SIG. Aujourd’hui, de nombreuses administrations comptent sur des infrastructures intégrées de données spatiales. Pourtant, si la collaboration entre municipalités voisines n’est pas une stratégie nouvelle pour répondre aux besoins des résidents, elle n’est pas encore une pratique courante.
Lorsque nous parlons de collaboration, nous parlons de municipalités qui partagent des données, des infrastructures et des connaissances afin de bâtir une capacité collective à laquelle elles ne pourraient avoir accès autrement. Une telle capacité peut être profitable à bien des égards, notamment pour améliorer les pratiques internes en matière de données, mettre en commun l’intelligence collective, prendre des décisions conjointes sur des enjeux régionaux, rendre accessibles des données géospatiales au profit d’initiatives communautaires économiques, sociales et environnementales ou encore déposer des demandes de ressources concertées auprès des paliers de gouvernement supérieurs.
Q : Dans le cadre de vos recherches, avez-vous relevé des exemples de collaboration inspirants?
Absolument. Des modèles exemplaires au Canada montrent que des municipalités travaillent déjà ensemble. Le site YorkInfo Partnership est un de ces modèles. Il s’agit d’une collaboration entre la région de York, ses neuf municipalités, deux conseils scolaires de district et deux offices de protection de la nature. Ensemble, ils ont préparé des analyses de rentabilité pour leurs principaux ensembles de données, des infrastructures essentielles en passant par les arbres de rue et les permis de construire. Le résultat démontre clairement l’intérêt de partager ces données, tant d’un point de vue interne que de celui du grand public. Après tout, les municipalités ne doivent pas perdre de vue les raisons qui motivent leur collaboration, et ces raisons doivent demeurer bien ancrées dans le contexte local.
Entre autres exemples, mentionnons le partenariat Alberta Municipal Data Sharing Partnership, une initiative d’échange de données municipales de l’Alberta dont l’objectif est de créer une carte du réseau routier sans discontinuité couvrant l’ensemble de la province. À l’origine, ce partenariat regroupait une poignée de municipalités, mais leur nombre n’a cessé d’augmenter au fil des ans. L’accent mis sur le soutien entre pairs y a certainement contribué, en permettant facilement aux nouveaux membres de rendre leurs données conformes aux normes exigées et de prendre part aux initiatives conjointes.
Q : Comment d’autres municipalités peuvent-elles entamer leur propre processus de collaboration?
Nous avons établi qu’il existe de solides arguments en faveur de la collaboration entre les municipalités. Mais comment un groupe de petites municipalités peut-il se lancer dans une telle démarche? Et de quoi doit-il tenir compte? Nous avons voulu examiner les facteurs humains et organisationnels qui influencent la façon dont prennent forme les collaborations en matière de données géospatiales.
Nous pouvons mettre en lumière plusieurs étapes clés dans un parcours typique vers la collaboration : déterminer et évaluer les possibilités; comprendre les capacités actuelles; concevoir et mettre en œuvre la collaboration; mesurer les résultats et partager les réussites. Chacune de ces étapes présente son lot de possibilités, mais aussi de défis qui attendent de nombreuses municipalités. Plutôt que d’offrir des réponses simples, nous encourageons le personnel des administrations municipales à réfléchir à des questions fondamentales sur leur parcours, par exemple : Quels incitatifs internes et externes pourraient servir de levier? Quelles sont les ressources disponibles chez les partenaires potentiels? Quelles sont les lacunes et comment les combler? Quelle forme doit prendre la collaboration? Quelles normes et quels processus devront être adoptés? Comment la réussite sera-t-elle mesurée?
Étapes clés du parcours de collaboration
Q : Et maintenant? Qu’est-ce qui doit être fait pour voir naître plus de collaborations?
Il y a certainement encore beaucoup de travail à faire pour dresser un plan de collaboration qui tient compte de tous les facteurs contextuels auxquels les municipalités sont soumises. Certes, la volonté de collaborer doit venir des municipalités elles-mêmes, mais nous nous sommes rendu compte que la création de l’espace nécessaire à l’établissement des collaborations doit aussi compter sur un large éventail d’intervenants appelés à soutenir les initiatives de différentes façons en cours de route.
Les gouvernements provinciaux peuvent certainement jouer un rôle plus important en créant les conditions favorables à l’émergence de collaborations, notamment en offrant le financement nécessaire et en investissant dans des infrastructures Internet à haut débit pour connecter les communautés éloignées. Quant aux administrations régionales, elles peuvent également soutenir la collaboration entre municipalités de palier inférieur en comblant les lacunes et en facilitant l’accès à des compétences spécialisées.
Il y a également un rôle pour les intervenants de l’écosystème au sens large, soit en dehors des administrations. Les acteurs de la société civile (par exemple, les organisations à but non lucratif ou les associations professionnelles) peuvent créer un environnement propice à la collaboration en organisant des forums et des réseaux d’échange de pratiques pour rassembler des municipalités confrontées à des défis similaires et mettre en commun leurs connaissances et leurs expériences. La société civile peut également s’associer aux municipalités pour apporter une expertise extérieure pertinente là où elle est nécessaire et pour documenter et partager les enseignements locaux avec des municipalités homologues.
Le secteur privé a également un rôle à jouer, en proposant des services de soutien aux municipalités de plus petite taille et de moindre capacité et en relevant les cas d’utilisation où la collaboration entre municipalités permet de soutenir l’écosystème d’innovation à l’échelle locale et présente une valeur pour le grand public.
Q : Quelle est la prochaine étape de cette initiative?
Avec cette recherche, notre objectif principal était de mettre la collaboration entre administrations municipales à l’ordre du jour et de susciter des conversations entre les différents acteurs des paliers décisionnels, de la société civile et du secteur privé appelés à prendre part aux initiatives en ce sens. Nous espérons qu’elle suscitera un regain d’intérêt pour l’établissement de collaborations entre les municipalités à un moment où cela s’avère plus nécessaire que jamais.
Consultez le rapport complet. : Bâtir les capacités géospatiales des municipalités : Un plaidoyer pour la collaboration
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Le présent billet de blogue a été coécrit en anglais par Alia Kotb d’Esri Canada et Steven Coutts de Nord Ouvert et peut être consulté ici.