Comment le boursier Blair Scriven s’est découvert une passion pour les SIG
Certaines personnes savent dès leur plus jeune âge ce qu’elles veulent faire plus tard. D’autres non. Et certains pensent le savoir, puis se rendent compte à mi-chemin de leurs études qu’en réalité, ils veulent faire autre chose. Blair Scriven fait partie du troisième groupe. Il a commencé par la biologie avant de se tourner vers la géomatique et de se retrouver étudiant en SIG au département de génie géomatique de l’Université de Calgary, où il a obtenu une bourse en SIG d’Esri Canada.
Dans cette profession, les gens sont nombreux à s’intéresser à un tout autre domaine, pour découvrir les SIG par hasard au travail, à l’école ou dans leur vie personnelle, et finalement décider d’en faire une carrière. J’ai moi-même décidé de faire une maîtrise en génie géomatique après avoir obtenu un diplôme de premier cycle en génie électrique, avec une mineure en études classiques, parce que le domaine semblait digne d’intérêt. Bon nombre des boursiers et des lauréats du Esri Young Scholar dont j’ai déjà parlé ont eux aussi emprunté un détour jusqu’aux SIG : Jessica Linzel est une historienne dont le projet de maîtrise portait sur les SIG; Patrick Droste a entendu parler des SIG en faisant du ski; François Veillette a travaillé dans le domaine de la télévision et des médias numériques avant de s’inscrire à un programme de SIG; et Anne Provencher St-Pierre est une biologiste marine qui a eu recours aux SIG dans le cadre de sa thèse de doctorat – et elle était la seule chercheuse de son centre à les utiliser au quotidien.
Lauréat de la bourse d’études de cette année, Blair Scriven, de l’Université de Calgary, est finaliste du concours pour le prix Esri Young Scholars (EYS) d’Esri Canada. L’étudiant a démontré qu’il se trouve également dans cette catégorie lorsqu’il a avoué ceci dans la déclaration personnelle de sa candidature du EYS : « quand [il] est allé à [son] premier cours sur les SIG, [il] n’aurait même pas pu dire ce que représentait l’acronyme ». Par courriel, j’ai demandé à Blair de me dire ce qui l’a poussé à étudier les SIG, de m’expliquer où se situe un spécialiste des SIG dans un département de génie géomatique et de me décrire ses expériences d’apprentissage en général.
Vous êtes titulaire d’un baccalauréat en géomatique environnementale et en géosciences de l’Université de Guelph, mais ce n’est pas dans ce programme que vous vous étiez d’abord inscrit. Quelle était votre majeure avant de passer à la géomatique? Y a-t-il une partie de ce que vous avez appris avant de changer de programme qui vous a servi dans vos cours de géomatique?
J’ai fait plusieurs majeures avant la géomatique. J’ai un diplôme en biotechnologie, dont je n’ai pas vraiment vu l’utilité ces derniers temps, si ce n’est que de me servir à expliquer le fonctionnement des différents vaccins contre la COVID-19 à des membres de ma famille et à des amis prudents. Pendant mes études de premier cycle, j’ai d’abord fait une majeure en biologie générale. Je suis ensuite passé à la biologie marine et des eaux douces, puis à la biologie environnementale, et enfin, à la géomatique, au début de ma troisième année. Un parcours assez inhabituel, je le sais. Je suppose que je n’étais pas certain d’abandonner la biologie, tout simplement. La plupart de mes apprentissages d’avant la géomatique ne m’ont plus servi par la suite, à l’exception de certains cours d’écologie et de statistique que j’ai suivis, particulièrement les cartes écologiques que j’ai étudiées et les modèles de régression linéaire multiple que j’ai créés avec R.
Pendant que vous étiez à l’Université de Guelph, vous avez participé à un stage international de pratique de terrain aux Pays-Bas. Pendant la pandémie, ce genre de cours ne se donne plus. Y a-t-il une chose que vous avez apprise durant le stage de terrain que, selon vous, vous n’auriez pas eu l’occasion d’apprendre dans un environnement virtuel ou en ligne?
Pendant le stage de pratique de terrain, nous sommes allés aux Pays-Bas pour découvrir l’histoire et la culture néerlandaises ainsi que pour en apprendre davantage sur la crise des réfugiés en Europe des années 2010. Il s’agissait en grande partie de visiter des musées ou des attractions touristiques et de rédiger des rapports sur nos activités de la journée. Pas de géographie ni de géomatique dans ce cours, j’en ai bien peur. Mais tout compte fait, j’aurais probablement pu remettre une carte récit sur les statistiques des réfugiés néerlandais ou un truc du genre pour mon évaluation, sans qu’il y ait de problème. En principe, ce que nous avons appris, nous aurions pu pour la majeure partie le découvrir en faisant une visite virtuelle des musées ou des appels Zoom avec des conférenciers invités. Mais je sais que l’expérience n’aurait pas été aussi intéressante ou mémorable si je n’avais pas pu entrer dans la maison d’Anne Frank à Amsterdam ou la Humanity House à La Haye (qui est malheureusement fermée définitivement en raison de la pandémie, mais dont le travail remarquable vaut la visite pour les personnes ayant un intérêt pour la situation migratoire). J’en garde beaucoup de bons souvenirs, bien plus qu’avec la plupart de mes cours magistraux.
Dans votre candidature au EYS, vous affirmez qu’il y a toujours plus à apprendre, et que c’est l’une des principales leçons que vous avez tirées des SIG. Vous avez aussi affirmé que vos apprentissages, vous les avez en grande partie faits par vous-même. À votre avis, en quoi l’apprentissage autodidacte a-t-il influencé vos études (par rapport à des cours essentiellement structurés)?
Ne pas avoir à me lever pour un cours à 8 h 30 parce que j’apprenais par moi-même était certainement agréable. Je ne me suis pas non plus ennuyé du stress et de l’anxiété des examens; j’ai toujours eu de meilleurs résultats avec les projets qu’avec les tests. Cela dit, il m’est arrivé de penser que j’étais prêt à aborder un sujet ou à apprendre une compétence avancée, et de devoir me raviser. Par exemple, quand j’ai commencé à mettre au point le prototype de mon application web de cartographie des inondations, je pensais être prêt à programmer des cartes interactives. Mais après presque deux semaines à essayer sans succès, j’ai compris que mes compétences en JavaScript et en HTML n’étaient pas à la hauteur. J’ai donc dû prendre deux semaines pour arriver au niveau où je devais être. Si j’avais suivi un cours structuré de cartographie web en ligne, je pense que j’aurais eu une meilleure idée des compétences en programmation à maîtriser, et que je me serais évité quatorze jours de misère.
Avez-vous des conseils à donner aux étudiants ayant un intérêt pour le domaine des SIG, ou aux personnes d’autres domaines qui considèrent changer de carrière? Y a-t-il quelque chose que vous auriez aimé savoir avant de réorienter votre champ d’études et votre carrière vers les SIG?
Apprendre à coder! Je sais que tous les programmes universitaires en SIG ne vous obligent pas à apprendre le codage, mais ce devrait vraiment être le cas. Entre autres, Python, JavaScript, HTML et R vous seront très utiles. Esri Canada propose d’excellentes ressources, dont la page Learn to App, qui m’a vraiment aidé à me lancer dans la programmation de cartes web interactives. Commencez aussi à monter votre portfolio! Je vous recommande d’utiliser GitHub Pages ou ArcGIS Online pour héberger vos cartes ou tableaux de bord. Faites-le dès maintenant!
Votre programme de maîtrise se donne dans le département de génie géomatique de l’Université de Calgary. Pourquoi avez-vous choisi le programme? Votre projet de thèse imposait-il des exigences qui auraient fait défaut avec un travail de maîtrise en sciences pures?
Ce n’est pas la première fois qu’on me demande pourquoi un étudiant inscrit à une majeure en sciences se retrouve dans un département de génie. Je me suis moi-même posé la question, surtout considérant que j’allais déménager à l’autre bout du pays pour suivre ce programme de maîtrise (je suis originaire de la région de Waterloo). Ce qui m’y a finalement amené, c’est le projet de thèse proposé. J’ai vu l’importance de la cartographie pour la gestion des urgences et la reprise après sinistre, comme pour le séisme à Haïti en 2010. C’est une des raisons pour lesquelles je me suis orienté vers la géomatique. J’ai donc été séduit par l’idée de créer une application web de cartographie des inondations, d’autant plus qu’à ce moment-là, je n’avais pas encore appris à programmer une carte web et je voulais relever le défi. Heureusement, le projet de thèse ne nécessitait qu’une certaine expérience du codage et une connaissance des flux de travaux de géotraitement, alors un étudiant à la majeure en sciences comme moi avait tout de même la tête de l’emploi. Personne dans le département de génie géomatique ne semblait remettre ma présence en question, peut-être parce que mes études en sciences n’étaient pas complètement étrangères à la géomatique. Une fois, un professeur a dit qu’un de mes projets scolaires était « très géographique ». Je l’ai pris comme un compliment.
L’outil que vous avez développé dans le cadre de votre projet de thèse, CERC-HAND-D, offre des applications pratiques et immédiates. Qui seront les utilisateurs et comment en feront-ils usage? Est-ce que des gouvernements ou d’autres organisations ont manifesté un intérêt?
Avec l’aide de mes superviseurs, Heather McGrath de Ressources naturelles Canada et Emmanuel Stefanakis de l’Université de Calgary, j’ai mis au point l’outil Canadian Estimator of Rating Curves using HAND & Discharge (CERC-HAND-D) pour la gestion des inondations, afin que les techniciens et les spécialistes du domaine de la gestion des urgences puissent exploiter notre outil de façon optimale. CERC-HAND-D s’avère très utile, car l’outil permet aux utilisateurs de créer des courbes d’étalonnage synthétiques dans les tronçons de rivière dépourvus de station de jaugeage. Par le fait même, les courbes d’étalonnage synthétiques, de façon très semblable aux courbes d’étalonnage ordinaires, peuvent fournir aux utilisateurs des données sur les conditions de haut débit et rendent possible la conversion des données de débit (m3/sec) en données de niveau d’eau (m). Notamment, un technicien pourrait utiliser une courbe d’étalonnage synthétique pour convertir les prévisions de débit en données de niveau d’eau, pour ensuite intégrer les données converties à un modèle d’inondation. À l’heure actuelle, nous discutons également avec le Centre canadien de cartographie et d’observation de la Terre, une division de Ressources naturelles Canada (qui a financé mon projet) de l’apport de CERC-HAND-D dans l’utilisation des satellites de la mission de la Constellation RADARSAT (MCR) pendant les inondations.
Une carte récit créée par Blair Scriven présente l’objectif et les étapes d’exécution de l’outil CERC-HAND-D.
En tant que titulaire d’une bourse d’études en SIG d’Esri Canada, vous avez reçu des logiciels, des livres et des formations. À titre de lauréat du prix Esri Young Scholars du Canada, vous avez gagné un livre d’Esri Press. Y a-t-il un de ces éléments que vous avez particulièrement hâte d’utiliser?
Je suis très enthousiaste à l’idée de continuer à créer des cartes et des applications web à l’aide du programme ArcGIS Developer. J’ai tellement d’idées à explorer grâce à la cartographie web, et j’ai hâte de constater tout ce que je peux faire! Je suis aussi impatient de lire le deuxième tome de GIS for Science (SIG pour la science). C’est Jared Diamond, une de mes idoles en géographie, qui en aurait écrit la préface. Tout ce qui réunit GIScience et Jared Diamond est forcément phénoménal!
Avant la pandémie, vous avez bénévolement animé des ateliers auprès d’élèves à l’école primaire. Avez-vous utilisé ArcGIS pour ces ateliers? Sinon, comment pensez-vous que vous auriez pu utiliser ArcGIS pour démontrer les mêmes concepts?
Quand j’étais bénévole pour Students on Sustainability (SoS) à l’Université de Calgary, j’ai dirigé quelques ateliers en me servant d’un outil éducatif appelé Alberta Tomorrow pour simuler le processus d’aménagement durable dans la province de l’Alberta. Les élèves ont été mis au défi de trouver un juste milieu entre les pratiques d’utilisation des terres (agriculture, pétrole et gaz, etc.) et le maintien de l’équilibre écologique. De plus, l’outil comprenait des rapports que les élèves pouvaient remplir pour les donner à leurs enseignants. Bien qu’ArcGIS ne nous ait pas servi dans ce cas, on peut enseigner les mêmes concepts de durabilité et d’équilibre entre industrie et écologie au moyen d’une carte récit ou d’ArcGIS GeoPlanner. L’application GeoPlanner serait une solution particulièrement intéressante, car on peut l’utiliser pour l’aménagement paysager et la conception de scénarios axés sur l’impact. L’application est peut-être un peu plus dynamique que nécessaire pour apprendre les concepts de durabilité aux élèves du primaire. Cela dit, tout logiciel avec des outils de peinture et de dessin fera assurément le bonheur des jeunes apprentis.
Y a-t-il des ajouts ou des modifications que vous aimeriez voir un jour dans la communauté SIG?
J’aimerais une meilleure représentation des LGBTQ+ dans la communauté SIG, notamment par un plus grand nombre de panels lors des conférences SIG ou des carrefours communautaires qui conçoivent des cartes au service de notre communauté, comme LGBTQ Resources Map of Los Angeles (ressources LGBTQ – carte de Los Angeles) ou LGBTQ Outdoor Groups Map (carte des groupes LGBTQ en plein air). Je sais qu’une réunion de groupe sur un sujet d’intérêt LGBTQIA+ aura lieu à la Conférence des utilisateurs d’Esri, et c’est merveilleux, mais plus on est de fous, plus on rit! J’aimerais particulièrement voir ce genre d’activité au Canada, étant donné que le contenu sur les SIG LGBTQ+ met en majorité l’accent sur les États-Unis. N’hésitez pas à me contacter si vous aimez l’idée de fonder un groupe SIG LGBTQ+ ou quelque chose de similaire!
Pour célébrer le Mois de la Fierté, j’aimerais souligner quelques magnifiques cartes récits qui présentent l’histoire de la communauté LGBTQ+ et mettent en lumière les défis auxquels nous devons faire face : The History of Pride (l’histoire de la Fierté), Identity, Immigration, and Institutional Maltreatment (identité, immigration et maltraitance institutionnelle), LGBTQ+ Youth Inclusion in Cambridge Out-of-School Time Programs (inclusion des jeunes LGBTQ+ aux programmes parascolaires de Cambridge), LGBTQ+ Pride & Power (Fierté et pouvoir LGBTQ+) et bien plus!
Ce billet a été écrit en anglais par Krista Amolins et peut être consulté ici.