Comment la technologie géospatiale facilite-t-elle la surveillance des GES? GHGSat a la réponse.
Selon l’Organisation météorologique mondiale, 26 des 50 variables climatiques essentielles ne peuvent être observées efficacement que depuis l’espace. Entreprise montréalaise de pointe en technologie spatiale et en gestion de données, GHGSat est la première à utiliser des satellites pour surveiller les gaz à effet de serre (GES). Adina Gillespie, directrice du développement des affaires à GHGSat, explique comment l’entreprise s’appuie sur la technologie d’Esri pour exercer ses activités.
La récente conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP26) nous a rappelé encore une fois l’importance de la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans la lutte contre le réchauffement climatique.
Les pays sont exhortés à réduire leurs émissions.
Les entreprises sont sanctionnées si leur production d’émissions de gaz à effet de serre est supérieure à certains seuils.
Pour qu’elles soient en mesure de réduire leurs émissions, les entreprises doivent connaître précisément la quantité de gaz à effet de serre qu’elles émettent. Comment? Par une utilisation novatrice et efficace des satellites. Le gouvernement fédéral s’est tourné vers une entreprise canadienne qui répond parfaitement aux exigences de la situation : GHGSat. Entreprise montréalaise de pointe en technologie spatiale et en gestion de données, elle est la première au monde à avoir des satellites en orbite capables de surveiller les gaz à effet de serre au niveau des installations.
Aujourd’hui, GHGSat compte trois satellites en orbite. Elle lancera trois satellites en 2022, puis cinq autres en 2023. La plupart des satellites détectent les émissions d’une zone assez étendue. Ceux de GHGSat se concentrent sur les installations industrielles, ce qui est d’une importance capitale pour la réduction des émissions.
GHGSat se développe rapidement parce qu’elle dispose d’une technologie de pointe, en plus de s’être dotée de fonds privés et publics pour concrétiser ses objectifs de croissance.
À la COP26, le gouvernement canadien a annoncé que GHGSat fournira le premier ensemble de données satellitaires à haute résolution à l’Observatoire international des émissions de méthane (IMEO), un centre international indépendant de collecte et de vérification des données sur les émissions de méthane. Le méthane étant un puissant gaz à effet de serre à courte durée de vie (comparativement au dioxyde de carbone), des réductions importantes auraient un effet rapide et manifeste sur le réchauffement atmosphérique. Le gouvernement du Canada soutient également GHGSat en lui accordant un financement de 20 millions de dollars provenant de Technologies du développement durable Canada, un fonds à l’appui de ce qu’on appelle des « pionniers des technologies propres », c’est-à-dire des entreprises qui ont pour mission de développer et d’éprouver de nouvelles technologies visant à lutter contre les changements climatiques.
Pour comprendre le rôle de la technologie d’Esri dans ce contexte, nous avons invité Adina Gillespie, directrice du développement des affaires à GHGSat – et « intello de la géographie » autoproclamée – à participer à la baladodiffusion Geographical Thinking d’Esri Canada. Vous pouvez écouter cette conversation ici.
Adina Gillespie travaille depuis longtemps dans le domaine des applications de la technologie d’observation de la Terre. Elle a fait son entrée sur le marché du travail avec en poche un diplôme de premier cycle en géographie de l’Université McGill. Elle a ensuite poursuivi des études en télédétection (soit la science de l’utilisation d’images satellitaires ou aériennes dans des applications environnementales et autres) à l’Université de Waterloo.
Adina Gillespie est directrice du développement des affaires à GHGSat.
L’Agence spatiale canadienne s’est intéressée à ses recherches et l’a encouragée à se rendre à l’Université internationale de l’espace, en France. Elle a eu la chance d’y rencontrer des personnes aux intérêts variés, des voyages dans l’espace aux ascenseurs spatiaux, en passant par l’utilisation d’images satellitaires.
Les images satellitaires sont devenues sa spécialité et depuis, elle a travaillé sur plusieurs projets passionnants et importants. « L’une des entreprises pour lesquelles j’ai déjà travaillé a fourni les toutes premières images satellitaires recueillies après l’ouragan Katrina. Nous avons également fourni des images qui ont été utilisées au Nigeria afin de repérer les camps de secours pour les villageois relocalisés en cas d’inondations majeures », se souvient-elle.
Bien que les divers rôles qu’elle a occupés dans sa carrière lui ont toujours permis de s’épanouir, c’est le poste qu’elle occupe à GHGSat qui l’emballe le plus. « C’était la première fois que je voyais une entreprise utiliser son tout premier satellite pour faire plus qu’une démonstration technologique, mais plutôt comme un véritable satellite d’exploitation commerciale. » Elle affirme sans hésiter qu’« en matière d’impact par unité d’effort, c’est le meilleur travail que j’ai eu. »
« Ce que nous savons en géographie, c’est que des données de toutes sortes sont nécessaires pour répondre aux grandes questions de notre époque », déclare Adina. Les données et les analyses géospatiales jouent un rôle important dans la transformation des données satellitaires en renseignements exploitables. « Nous pourrions mesurer les émissions d’où elles proviennent, directement sur le terrain », précise-t-elle, mais cette infrastructure « est très coûteuse à déployer et à entretenir, en particulier dans les régions éloignées ».
« On a besoin de satellites pour accéder à des endroits que l’on ne peut pas atteindre autrement », note-t-elle, et ils « nous permettent d’obtenir une image globale ». Le personnel de GHGSat combine des données provenant d’images aériennes ainsi que des données spatiales et terrestres, ce qui signifie qu’il travaille avec de grands ensembles de données mondiaux. « En combinant ces éléments, nous obtenons une image complète. Les exploitants et les gouvernements ont besoin de voir cette image alors qu’ils s’efforcent d’atteindre leurs objectifs de carboneutralité au cours des prochaines années », souligne Adina.
La décision de GHGSat d’exploiter la technologie d’Esri pour appuyer son service géospatial s’explique par la simplicité des outils. « Nous n’avons pas besoin de compliquer les choses pour nos clients », explique Adina. Elle fait également remarquer que « pour permettre aux utilisateurs du gouvernement de comprendre ce qui se passe, la simplicité est de mise. la [technologie d’]Esri est donc tout indiquée. »
Mobiliser les différentes parties prenantes dans la lutte contre le changement climatique nécessite de la délicatesse. C’est ce qu’on appelle la « diplomatie climatique », et une entreprise comme GHGSat se trouve parfois au coeur de celle-ci.
« Au départ, avec notre premier satellite, nous repérions les émissions, puis nous frappions à la porte de l’exploitant pour lui dire : ‘‘nous avons vu ça depuis l’espace.” S’ensuivait une conversation quelque peu embarrassante », admet Adina. Cependant, une fois que les exploitants comprenaient que l’objectif commercial de GHGSat n’était pas de pointer les organisations du doigt ni de ternir leur réputation, mais bien de collaborer pour remédier aux fuites de méthane, ils acceptaient de prendre part aux efforts. Cette approche plus diplomatique, visant à travailler en collaboration avec les exploitants et les gouvernements, a porté ses fruits.
Parfois, une approche discrète fonctionne mieux entre les gouvernements. « Nous avons vu des gouvernements frapper à la porte d’autres gouvernements et leur dire : ‘‘voici ce que nous voyons sur les images satellitaires. Travaillons ensemble pour trouver une solution” ». Par ailleurs, comme le mentionne Adina, « ce n’est pas toujours ce qui se fait de mieux aux yeux du public ».
Les scientifiques qui ont consacré leur carrière aux gaz à effet de serre et aux changements climatiques se méfiaient un peu de la jeune entreprise canadienne, mais GHGSat travaille désormais avec eux, et l’échange d’information va bon train. C’est aussi en partie la raison pour laquelle Adina est basée au Royaume-Uni.
En 2008, le Royaume-Uni a adopté la première loi sur le changement climatique au monde. En 2020, l’Union européenne a publié une stratégie sur le méthane. Au cours des dernières années, de nombreux mandats climatiques visaient à ce que les États réduisent à zéro leurs émissions néfastes pour le climat à une date précise. Les règles environnementales, sociales et de gouvernance deviennent un impératif stratégique pour les entreprises, compte tenu des répercussions environnementales des investissements financiers, en plus d’être de plus en plus importantes pour les investisseurs.
Grâce à sa position centrale sur le marché international, soit directement au cœur du quartier financier de Londres, GHGSat a pu voir tout le potentiel du marché.
« Ma vision de l’entreprise dans son ensemble est que nous ne desservons pas seulement les exploitants, mais aussi les gouvernements qui s’efforcent de comprendre les sources de données et les preuves d’émissions », explique Adina.
Lorsqu’Adina a enseigné la climatologie à l’Université de Waterloo au début des années 2000, elle raconte que ses étudiants devaient chercher des récits sur le climat. Aujourd’hui, il y a des centaines de nouveaux récits sur le climat, parce que les gens y prêtent attention et qu’ils s’en soucient.
« Nous sommes les premiers, mais nous ne serons pas les derniers. De plus en plus d’organisations proposent de nouvelles technologies pour relever le défi de la carboneutralité. Il y aura probablement une certaine concurrence. Cependant, je ne pense pas qu’elle sera rude, car tout le monde a besoin de ces technologies », commente Adina.
Littéralement tout le monde. Sur son site web, GHGSat met gratuitement à disposition une carte qui permet de visualiser les concentrations de méthane dans le monde. Appelée « Pulse », elle est conçue pour soutenir les discussions sur le méthane et sensibiliser les gens à ce problème. Elle montre à quoi ressemblent les émissions de méthane sur un quadrillage de deux kilomètres carrés partout dans le monde. L’espoir est que la présentation de ce type de données (pas toujours faciles à comprendre) d’une manière conviviale suscitera l’intérêt des gens.
Et pour Adina Gillespie, plus on est de fous, plus on rit.
« Il est génial de répondre à des questions en s’appuyant sur des données géospatiales, mais pour avoir un impact, il faut plus que des approches singulières – plus que des scientifiques géospatiaux, plus que des technologies et plus que des décideurs politiques. Nous devons travailler tous ensemble sur ce sujet », affirme-t-elle. Autrement dit, pour répondre à l’urgence climatique, nous devons tous nous mobiliser.
Pour en apprendre davantage sur GHGSat et son incroyable travail, écoutez notre entrevue complète avec Adina Gillespie sur votre application de baladodiffusion préférée.
Ce billet a été écrit en anglais par Mary Ambrose et peut être consulté ici.